Centre Européen Des Résistants Déportés – Appel aux dons

Le Centre Européen du Résistant Déporté (CERD), site de l'ancien camp de concentration de Natzweiler-Struthof, souhaite améliorer l'accessibilité de son patrimoine historique aux personnes en situation de handicap.

Dans le cadre de cette démarche, le CERD envisage d'aménager une maquette tactile du camp, à destination des déficients visuels.

Ce projet s'inscrit également dans une démarche mémorielle. Il permettra de rendre hommage à Arthur POITEVIN, né à Port en Bessin-Huppain.

Professeur de musique et aveugle, il fut déporté au camp de Natzweiler en 1943 pour faits de résistance. Il y composa "La voix du rêve", une œuvre devenue depuis un hymne pour tous les déportés.

 Pour mener à bien cette initiative, le CERD sollicite le grand public au travers d'une campagne de collecte de don.

En effectuant un don directement au Centre européen du résistant déporté ou à l'aide du coupon au dos, vous participez à la réalisation de cette maquette et à son implantation à l’entrée du camp. Cette reconstitution en trois dimensions profitera également aux autres visiteurs et notamment au jeune public, puisqu’elle traduit une réalité spatiale difficilement perceptible au ras du sol.

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Arthur Poitevin

Surnommé « Tutur de Bayeux »

Né le 6 décembre 1917 à Port-en-Bessin.

A l’âge de 3 ans, il devint aveugle. Il entre à l’institut des jeunes aveugles de Clermont Ferrand en octobre 1925. Passionné de musique et fort doué, sous l’occupation, il occupa la fonction d’organiste et de professeur de musique à l’établissement Jeanne d’Arc et à l’école Notre Dame. Il fut également violoniste. Il est marié à Raymonde Letourneur, institutrice à l’école Notre Dame.

Il devint un membre actif de la Résistance, mouvement Libération-Nord de Basse-Normandie.

Arrêté par les nazis en septembre 1943 pour avoir renseigné et aidé un Polonais, agent de la Gestapo. (Un mois après l’arrestation de son cousin Joseph Poitevin). Il fut interné puis déporté avec son cousin Joseph dans le camp de concentration de Natzweiler-Struthof (en Alsace) en 1943.

Il portait alors le matricule 5967 au camp de Natzweiler-Struthof et le matricule 101 336 à Dachau.

Lors de l’évacuation du camp du Struthof fin août 1944, il fut transféré à Dachau le 6 septembre 1944 et libéré par les Américains le 29 avril 1945.

A son retour dans le Bessin, le 17 mai 1945, il retrouve sa femme et reprend son activité d’organiste de la cathédrale de Bayeux. Plus tard, il ouvre une librairie, rue Saint Jean à Bayeux.

Il meurt en 1951 à l’âge de 34 ans.

 
  • Le block 10 du camp du Struthof était sous la direction d’un kapo luxembourgeois qui tolérait les instruments de musique des détenus, ainsi que leurs chants. Arthur Poitevin composa le 19 janvier 1944 un chant, « la voix du rêve », qui évoque à la fois le camp et l’espoir de la libération. Cette chanson devint l’hymne du block 10.
  • Extrait de La Résistance en Enfer, de Roger Leroy, Roger Linet, Max Nevers, déportés NN (Editions Messidor, 1992) :
  • « Nous avions fait venir Tutur dans notre block, un soir, pour l’entendre interpréter sa chanson. Je me souviens avec quelle attention émue nous l’écoutions. Je ne pouvais que penser à mes enfants. Cette chanson devint la nôtre au camp. Les êtres qui nous étaient chers n’étaient pas oubliés, cette vie que nous menions n’était qu’un cauchemar puisque le rêve pour nous était de recouvrer la liberté.
  • J’ai vu des camarades avoir les larmes aux yeux, c’était des larmes de tendresse à l’adresse de leurs familles qui ignoraient tout d’eux, mais qu’ils pensaient revoir bientôt tellement leur optimisme était grand. Brave Tutur, tu nous as aidés beaucoup à remonter le moral de nos camarades. Il m’est arrivé lorsque j’allais voir les plus abattus, de leur fredonner ta chanson, un sourire effleurait leurs lèvres, ils reprenaient confiance. »

 

Chanson de Natzweiler-Struthof : la voix du rêve

 

I

Quand revient le moment du rêve,
Que peu à peu le Block entier s'endort,
Dans le soir qui s'achève,
Quand le vent de la nuit vient pleurer près des miradors,
Parfois en notre âme un peu lasse,
Monte soudain un trouble sans pareil,
C'est comme un gai refrain qui passe,
C'est comme un rayon de soleil.

II

Le songe a supprimé l'espace,
À la maison nous voici de retour,
La chaise est à sa place,
Au coin de la table où nous prenions nos repas chaque jour,
Voici venir le cher visage,
Nos bien-aimés nous sourient tendrement,
Pour ne pas troubler le mirage,
Les gars ronflez plus doucement.

REFRAIN :

Écoutez c'est la voix du rêve,
Qui revient chanter en nos cœurs,
Déjà l'aube se lève,
Présageant pour l'avenir des jours meilleurs,
Miradors, barbelés, brimades, cela n'est plus que des souvenirs amers,
Nous rirons de nos peines bien loin de Natzweiler.

III

Quelle allégresse règne en notre âme,
Ah! Quel bonheur! Ah! qu'il fait bon chez nous!
Enfants, parents ou femmes,
Tous leurs baisers ne nous avaient jamais semblé si doux,
Notre fringale est apaisée,
Plus de Mutzen! Adieu les numéros,
Fini: appels, rabiots, corvées,
Mais ne remue pas tant là-haut.

IV

Aujourd'hui cela n'est qu'un songe,
Oui! Mais demain le réalisera,
Si les jours se prolongent,
Disons-nous que bientôt la liberté nous reviendra,
Pour cette liberté chérie,
Préparons bien nos cœurs et nos esprits,
Afin que nos fils en leur vie,
N'aient à jamais, à venir ici.

REFRAIN :

Natzweiler est un mauvais rêve,
Qui bientôt fuira de nos cœurs,
Déjà l'aube se lève,
Présageant pour l'avenir des jours meilleurs,
Miradors, barbelés et chaînes,
Ne seront plus que souvenirs amers,
Nous rirons de nos peines bien loin de Natzweiler.